Les établissements ou services d’accompagnement par le travail (ESAT) : principe, fonctionnement et spécificités
Les ESAT, en tant qu’établissements médico-sociaux, offrent un cadre spécifique aux travailleurs en situation de handicap. Le point sur leur rôle et les différences avec l’entreprise adaptée
Mis à jour le 20 mai 2025Stéphanie Brassart - Responsable marketing et communication ELISE6 mins de lecture
Pour les plus pressés
Les Établissements ou Services d’Accompagnement par le Travail (ESAT) sont des structures médico-sociales qui accompagnent des personnes en situation de handicap à travers l’activité professionnelle, tout en offrant un soutien adapté à leurs besoins.
En 2023, la France comptait 1 493 ESAT, accueillant environ 120 000 personnes.
Bien que les ESAT jouent un rôle clé pour l’accompagnement des personnes en situation de handicap, le statut des travailleurs en ESAT, ambigu et distinct de celui des salariés classiques, soulève des questions, notamment concernant leur rémunération et la reconnaissance de leur travail.
En France, en 2023, 1493 Établissements ou services d’accompagnement par le travail (ESAT) accompagnent environ 120 000 personnes en situation de handicap (1). Les ESAT sont des établissements médico-sociaux, le plus souvent gérés par des associations, qui utilisent le travail comme support d’accompagnement médico-social des personnes qu’ils accueillent. Créés en 2005, ils ont remplacé les anciens Centres d’aide par le travail (CAT) et sont aujourd’hui les seuls établissements relevant du milieu de travail dit “protégé”, par opposition au milieu “ordinaire”. En effet, l’accès aux ESAT est réservé aux personnes qui ne sont pas en mesure de travailler dans une entreprise ordinaire ou dans une entreprise adaptée.
Qui peut être accompagné par un ESAT ?
Une personne en situation de handicap rejoint un ESAT sur décision d’orientation de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) — il s’agit d’une instance rattachée aux Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) qui statue sur les droits des personnes en situation de handicap. Pour prendre cette décision, la CDAPH estime que la capacité de travail de la personne est réduite, et correspond environ à un tiers de celle d’un travailleur valide.
Selon l’IGAS, les ESAT accueillent une population très diversifiée, tant en termes d’âge que de parcours ou de handicaps. Si, historiquement, les ex-CAT accueillaient principalement un public présentant une déficience intellectuelle, aujourd’hui, les handicaps présents en ESAT couvrent aussi des handicaps liés à une pathologie psychique ou à des troubles du comportement, ou encore des déficiences sensorielles, motrices, ou encore un polyhandicap. Pour un tiers des personnes accompagnées, l’ESAT est la suite d’un parcours en établissement spécialisé pour enfants et adolescents en situation de handicap (les IME, les IMpro). Pour d’autres, l’entrée en ESAT survient après une période d’inactivité professionnelle, un parcours dans d’autres établissements médico-sociaux ou les suites d’une rupture de parcours (plus grande fatigue avec l’âge, handicaps tardifs ou dégénératifs, qui conduisent à ne plus pouvoir travailler dans une entreprise classique ou adaptée). Cette diversité des profils apporte une complexité supplémentaire dans la gestion des missions des ESAT.
À noter
Les personnes en situation de handicap sont un public polymorphe
En France, en 2021, la DREES estimait à 7,6 millions le nombre de personnes en situation de handicap (soit 14 % de la population de 15 ans ou plus). Ce chiffre inclut 6,8 millions de personnes déclarant au moins une limitation sévère dans une fonction physique, sensorielle ou cognitive et 3,4 millions de personnes se déclarant fortement limitées dans leurs activités habituelles en raison d’un problème de santé (2). La notion de handicap est complexe, protéiforme, les besoins des personnes sont différents, les capacités à travailler avec ou sans accompagnement aussi, le souhait d’évoluer dans un milieu d’entreprise plus ou moins protecteur n’est pas le même pour tous. « Les personnes en situation de handicap » ne sont donc pas un même bloc : chacun est avant tout une personne, avec ses besoins, ses envies, ses compétences. Chez ELISE, accompagner un être humain dans sa globalité et dans le projet qui lui correspond représente notre priorité.
Quelles sont les missions d’un ESAT ?
Les ESAT remplissent deux missions :
donner du travail aux travailleurs en situation de handicap durablement éloignés du marché de l’emploi et les accompagner pour qu’ils gagnent en autonomie ;
insérer vers le milieu ordinaire les personnes qui le souhaitent et qui le peuvent. Cette deuxième mission est implicite : aucun cadre réglementaire ne la mentionne, mais tous les objectifs donnés aux ESAT par les politiques publiques et les processus de réformes en cours pour ces établissements vont dans ce sens.
Ce travail d’insertion vers le milieu ordinaire peut passer par des mises à disposition des travailleurs en situation de handicap, par des stages et périodes de mise en situation, voire par un cumul entre un mi-temps en ESAT et un mi-temps en milieu ordinaire. Dans les faits, très peu de personnes accompagnées par les ESAT sont concernées actuellement : selon un rapport de l’IGAS (février 2024), cela a concerné 760 cas en 2022 (soit 0,6 % des personnes) (3).
Ces deux missions confèrent aux ESAT une double nature :
ils sont avant tout des établissements médico-sociaux ;
mais ils exercent des activités commerciales, qu’ils peuvent vendre à d’autres entreprises, par exemple.
Quel est le statut des personnes accompagnées par l’ESAT ?
Le statut des personnes accompagnées par un ESAT est ambigu et fait l’objet de nombreux questionnements depuis un rapport de l’IGAS paru en 2019 (4) : alors que ces personnes exercent un travail, elles ne sont pas considérées comme des salariées. Elles ne signent pas un contrat de travail, mais un « contrat de soutien et d’aide par le travail ». Elles ne relèvent donc pas du Code du travail, mais du code de l’action sociale et des familles. Elles ont un statut « d’usagers d’établissements médico-sociaux » — or ce terme irrite profondément les premiers concernés : de fait, ils sont des travailleurs.
Certains droits du travail sont appliqués aux travailleurs en ESAT :
Congés maternité, paternité, solidarité familiale et congés parentaux ;
Autorisations d’absence pour examen médical ;
Droit à la formation, à la Validation des acquis de l’expérience (VAE) et accès au compte personnel de formation (CPF).
Néanmoins, la convergence des droits n’est pas systématique : par exemple, pour les congés payés, ce sont les dispositions du Code de l’action sociale et des familles qui s’appliquent, et non celles du Code du travail.
Les disparités les plus importantes concernent :
la période d’essai en ESAT qui peut être de six mois renouvelables, plus longue que dans le droit commun ;
la rémunération : les travailleurs en ESAT perçoivent une rémunération inférieure à celle d’un salarié, d’un montant moyen de 60 % du SMIC (5).
Cependant, les travailleurs en ESAT ne peuvent pas être licenciés (sauf autorisation de la CDAPH), ni sanctionnés comme un salarié pourrait l’être.
À noter
Un statut qui fait débat
Le rapprochement du statut de salarié fait l’objet d’un débat au sein des politiques publiques en 2024 : l’augmentation de la rémunération pour un alignement sur le SMIC mettrait les ESAT dans des situations financières très difficiles qui nuiraient à leur capacité d’accompagnement des personnes. Par ailleurs, le statut de salarié supprimerait les aspects protecteurs du statut actuel (comme l’impossibilité d’être licencié). Fin 2024, le débat n’est pas tranché.
Quelle différence avec l’entreprise adaptée ?
Les ESAT et les Entreprises adaptées n’accompagnent pas de la même façon les personnes en situation de handicap, même si les deux structures visent à accompagner des personnes en situation de handicap vers l’emploi.
Les ESAT sont d’abord des structures médico-sociales, avec un rôle important d’accompagnement des personnes vers l’autonomie, là où l’entreprise adaptée est d’abord une entreprise, avec un rôle important d’insertion dans le monde du travail, grâce à l’adaptation des postes et de l’environnement de travail.
Par ailleurs, les personnes qui travaillent en entreprise adaptée ont le statut de salarié, et la capacité de travailler en milieu ordinaire de travail, ce qui n’est pas le cas des personnes accompagnées par les ESAT, qui ont besoin de plus de temps et d’aménagement pour effectuer les tâches qui leur sont confiées.
Pour autant, ESAT et Entreprises adaptées sont deux mondes qui collaborent ensemble et certains ESAT sont adossés à une Entreprise adaptée.
Article rédigé par Stéphanie Brassart
Depuis 10 ans, Stéphanie Brassart pilote chez ELISE, des initiatives alliant engagement environnemental et responsabilité sociale. Son engagement profond pour la protection de l’environnement et la création d’emplois en faveur de personnes en situation de handicap se traduit par le rayonnement d’ELISE au niveau national.
Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales. (2024). Convergence des droits des travailleurs handicapés en Esat vers un statut de quasi-salarié [Rapport] Cocsulté le 8 novembre 2024, à l’adresse https://www.unapei.org/wp-content/uploads/2024/03/2024-02-29-Rapport-IGAS-IGF-ESAT-STATUT-QUASI-SALARIAT.pdf
2
Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales. (2024).
3
Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales. (2024).
4
Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales. (2019). Les établissements et services d’aide par le travail. [rapport] Consulté le 8 novembre 2024, à l’adresse https://www.cheops-ops.org/assets/files/cheops/national/actualites/rapport-et-etude/2019-026r-esat.pdf
5
Inspection générale des finances et Inspection générale des affaires sociales. (2024)
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